vendredi 8 juin 2007

Bandonéon, de Pina Baush au Théâtre de la Ville

Moment très attendu de cette saison qui s'achève au théâtre de la Ville, cette pièce de Pina Baush des années 80. Elle relève de ces pièces écrites il y a plus de 20 ans et qui me font vibrer, qui me touchent, m'interrogent à l'instar de Café Müller, du Sacre, de Viktor ou encore de Kontaktof. Beaucoup plus que les créations de la prêtresse de Wuppertal présentées inlassablement par G. Violette et son équipe...
Alors Bandonéon que je n'avais cotoyé qu'au travers de photographies... il y a de nombreuses interrogations dans cette pièce fleuve : interrogation du spectacle, sur la danse ou plus précisément sur le monde du ballet, sur les rapports hommes-femmes... interrogations déclinées au rythme de tangos.

Ces scènes où des danseurs avortent leurs souffrances endurées face à des professeurs de danse classique sadiques ; les exigences du monde du ballet, le sourire aux lèvres, quoi qu'il advienne. Et Dominique Mercy, vêtu de son tutu, qui effectue, inlassablement, des grands pliés avant de chuter sur le côté. En nous montrant son corps, celui d'un homme d'une cinquantaine d'années, loins des images actuellement véhiculées par les danseurs étoiles qui occupent le haut de l'affiche sur toutes les scènes internationales.
Ces tangos dansés comme nul part ailleurs : la femme sur les épaules de son partenaire qui se retrouve la tête entre ses jambes pour ensuite chuter ensemble et continuer cette danse assis l'un sur l'autre. Moments sensuels, érotiques, mouvements d'ensemble qui ont fait la réputation de la compagnie de Wuppertal.

Et cette interrogation qui a parcouru le monde chorégraphique des années 80 : que doit-on montrer ? Dès le début du spectacle, un danseur pose la question : "Je dois faire quelque chose ?", question qui se reposera inlassablement au cours du spectacle de façon différente. Pina et ses danseurs apportent des éléments de réponse : un danseur effectue un pont, le temps d'un tango, les danseurs alignés le long du mur de ce qui a été une salle de café décorée de photos anciennes de boxeurs pour laisser place à une vaste pièce désaffectée... et ce changement s'est réalisé sous les yeux du spectateur, avant l'entracte, les danseurs continuant leur danse, les techniciens leur travail. Parce que Bandonéon date des années 80, et que poser ces questions et proposer des esquisses de réponses était sinon révolutionnaire au moins prémonitoire. Et dans cette espace que les danseurs tentent de ne pas limiter, le temps semble s'être arrêté et peser sur la représentation. Alors on se dit que les Jérôme Bel ("The show must go on"), Alain Buffard et autres n'ont rien inventé... Alors pourquoi cette désaffection des spectateurs en deuxième partie de Bandonéon ? Parce que 3 heures de spectacle, c'est trop ? Parce que les scènes répétées deviennent insupportables ? Parce que "ne rien montrer" ennuie ? ces questions ont été les raisons de dizaines de spectacles présentés dans la même salle et qui ont conduit à des applaudissements à tout rompre. Alors même que la qualité de l'interprétation de ces autres compagnies ne rivalisait pas avec celle des danseurs de Wuppertal. Seulement ici, dans ce lieu atemporel, on prend le temps... le temps d'exorciser ses angoisses, le temps de draguer, d'échanger, peut être de s'aimer. La succession de scènette n'est pas la promotion du "zapping" et c'est en cela que Bandonéon est une pièce clé et du répertoire du Tanztheater de Wuppertal et du monde du ballet.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Espero ver a Pina pronto en Barcelona y después de oiros a tí y a Jesús hablar de sus espectáculos aún más.

Si se confirma le Sacré, te informo rápido.

kreul a dit…

Gracias senora !